Jean de Roquetaillade : prémisses d’une défaite
Nous sommes en plein XIVème siècle, précisément en 1336, lorsque le jeune Jean de Roquetaillade, alors étudiant en théologie, entend véritablement comme une voix supérieure lui prodiguer des révélations injonctives relatives à l’état de la religion de son temps et la nécessité de la réformer. Cela ne peut-être qu’une voix divine qui l’exhorte à militer afin de combattre la papauté en place dans le but de promouvoir l’élection d’un pape réformateur. Il s’ensuit une période de vif intérêt pour l’alchimie chez Jean de Roquetaillade, qui, en substance, propose dans son ouvrage (1) écrit en 1350, une lecture cachée de la religion de son temps via une théorie personnelle de la transmutation des métaux vils en or. En réalité, les métaux sans valeur désignent les puissants religieux en place et le métal tant recherché symbolise les vrais hommes de fois devant les remplacer
L’emprisonnement pour hérésie de Jean de Roquetaillade
On comprend donc aisément que les puissants religieux de son temps ne mirent que peu de temps à fondre sur la liberté de Jean de Roquetaillade ne pouvant supporter l’espace d’un instant une telle doctrine, fut-elle voilée derrière un contenu d’alchimie, en témoigne cette phrase sans équivoque : « L’alchimie distillatoire, permet d’obtenir un remède souverain pour empêcher toute corruption, et donc toute maladie, et toute dégradation de la matière créée. » Il n’en faut pas davantage pour voir Jean de Roquetaillade, alors jeune frère mineur se faire incarcérer à la prison de Figeac pour hérésie et atteinte à la toute puissance du pape d’Avignon. D’autant plus, que le jeune religieux avait par ailleurs semé le trouble auprès de sa hiérarchie en prédisant l’arrivée future de l’Antéchrist qu’il aurait vu en rêve à la cour de l’Empereur de Chine
Les visions de Jean de Roquetaillade : une espérance déchue ?
Dès lors, le frère Jean de Roquetaille ne quittera plus l’univers carcéral malgré ses nombreux changements de prisons et ce, malgré également ses auditions auprès des puissants qui eurent vent de ses écrits subversifs. Ainsi, une fois à la prison d’Avignon, il put obtenir une audience auprès du Consistoire rattaché au pape Clément VI et proposer ses visions concernant notamment l’évolution de la situation politico-religieuse. Il prophétise en autres une crise de l’Eglise et la défaite de la France face à l’Angleterre lors de la bataille de Poitiers. Il fut reçu également par le cardinal Elie Talleyrand de Périgord en 1351, pour l’entendre exposer son analyse de la situation qui avait eu connaissance de ses écrits, notamment son Liber Ostensor de 1349 dans lequel il annonce l’arrivée de l’Antéchrist. Balayées d’un revers de main, les prophéties du frère Jean seront l’objet du délit à jamais et signe d’emprisonnement jamais reconsidéré. Ironie de l’histoire, l’avenir montrera que malgré quelques visions réalisées, l’Antéchrist n’aura jamais fait irruption…
(1 ) Ouvrage intitulé, De consideratione quintae essentiae (De la Quintessence)